Crise du coronavirus : le capitalisme tue. Éradiquons-le !

Deux mois de confinement. Notre patience est à bout et la colère envers ce système s’en mêle. Travailleuses, chômeurs, galériennes et exploités, nous n’avons pas chômé pendant ces mois d’assignation à résidence généralisée. Nous avons compris que le capitalisme tue plus que le virus, que sous prétexte d’état d’urgence sanitaire des mesures autoritaires et pro-capitalistes sont là pour nous exploiter davantage et tenter de nous faire courber l’échine. Mais comme pendant les mois de lutte Gilets Jaunes, nous ne lâcherons rien. Des solidarités sont possibles et nécessaires, notre rage prendra de nouvelles formes de lutte et nous ferons tout pour ne pas revenir à la « normalité » d’avant.

Brochure A5 mis en page là : Lutte-covid-brochure-A5

PDF A4 ici : Lutte-covid

Crise du coronavirus : le capitalisme tue. Éradiquons-le !

Début février, l’épidémie de COVID19 en Chine faisait la une de l’actualité. Quelques semaines plus tard elle atteignait l’Europe. Depuis, le monde vit massivement confiné.

Facilitée par la mondialisation et la multiplication des échanges marchands, la pandémie s’est généralisée. Désormais elle tue tous les jours des milliers de personnes dans le monde.

Même sans être spécialiste, on se rend compte que les responsabilités, au-delà de celles qui pourraient être imputées à la Chine, à l’Italie, à la France ou à tout autre pays, reviennent au système capitaliste.

En plus de l’augmentation de la fréquence des catastrophes « naturelles » type inondation, sécheresse, ouragan, mégafeu, due au réchauffement climatique et générée par la pollution de l’industrie capitaliste, les pandémies s’avèrent être une autre conséquence de l’activité prédatrice du capital.

Causée entre autres par l’intensification et l’extension des exploitations agricoles permettant d’assouvir une recherche toujours accrue de profit pour l’industrie agro-alimentaire ou encore par la déforestation pour créer de nouvelles zones d’exploitation forestière et énergétique (gaz, minerais…), la destruction de ces espaces naturels ne fait qu’augmenter l’interface avec de nouveaux agents pathogènes.

Ajouté à tout cela, la mondialisation de l’économie, la multiplication sans limite des transports, notamment aériens (plus de 100 000 vols par jour en moyenne, soit 8 millions de passagers), le tourisme de masse et la densification de la population en zone urbaine, font que l’agent pathogène peut rapidement quitter le niveau local pour gagner dans les métropoles et se répandre en peu de temps à l’échelle de la planète.

Pour tenter de faire face à cette « crise sanitaire », les États ont pris toute une série de mesures. Leur tâtonnement et leur cynisme sautent aux yeux : leurs ordres et injonctions ne cessent de varier au gré de leurs expérimentations hasardeuses et d’un décompte macabre pertes/bénéfices.

Dans de telles situations catastrophiques, ce n’est pas une nouveauté que les États et les capitalistes s’arrangent toujours pour affirmer leur légitimité, leur autorité et pour préserver leurs intérêts. Cela va de pair avec une dégradation de nos conditions de vie et de travail.

Après les grandes annonces au profit des entreprises (les aides d’État aux patrons, le code du travail qui part en miettes…) on devrait assister sans broncher à la multiplication des attaques contre les précaires et les travailleurs.

Il ne nous reste plus qu’à applaudir les soignants, en première ligne dans cette pandémie, alors qu’il y a quelques mois à peine ils manifestaient et que nous nous retrouvions ensemble dans la rue. La crise n’a pas amélioré leurs conditions de travail, bien au contraire, et des applaudissements de soutien, aussi forts soient-ils, ne pallieront jamais un système de santé dégradé depuis des années, soumis au vent violent de la privatisation des soins et des intérêts financiers.

En décrétant l’état d’urgence et en nous fournissant des informations très parcellaires, l’État adopte une stratégie qui maintient la population en état de choc permanent. Tant que cet état d’acceptation perdurera, l’État multipliera ses attaques et les résistances, les révoltes seront entravées.

Il est bien difficile de savoir ce qu’il faudrait faire contre une telle pandémie. Mais ce qui est sûr, c’est que l’État et les capitalistes, avec le cynisme de ceux qui ont le pouvoir, nous en font payer les conséquences. Il faut que nous nous préparions à contrer de toutes nos forces le recul social en cours, les mesures liberticides, un retour à la « normale » où la misère continuera de s’étendre chaque jour et où se succéderont les guerres, crises et catastrophes. Nous devons nous préparer à lutter pour une transformation profonde de la société.

Ne nous laissons pas diviser, ensemble attaquons nos réels ennemis !

Depuis que l’État a décidé de « gérer » cette crise sanitaire, on nous assène le discours de la responsabilité individuelle, avec comme seule option pour sortir de cette crise le respect individuel des mesures d’isolement. Comme si le nombre de morts et les ravages de l’épidémie dépendaient uniquement du comportement de chacun.

Le gouvernement et l’autocontrôle nous assignent à résidence et le zèle de certains les mène à dénoncer ceux qui ne respectent pas les ordres. La délation engorge les services de police, des citoyens exaspérés jettent de leurs balcons de l’eau bouillante sur les « inconscients » qui promènent leur chien ou qui font du jogging.

Ce sont les gens, individuellement, qui doivent fournir les plus grands efforts. Pointer du doigt les récalcitrants, souvent les plus pauvres, c’est une bonne méthode pour préparer le terrain à la répression. On stigmatise les jeunes des cités qui sortent dehors, mais être confiné dans une cité HLM ce n’est pas la même chose que de s’isoler dans une villa de campagne ! Sur les marchés et particulièrement les marchés populaires, les gens sont parfois très proches, mais a-t-on vraiment le choix ?

À l’époque de la Peste Noire, les boucs émissaires étaient les Juifs et les lépreux. Aujourd’hui, le gouvernement, relayé par de nombreux médias, accuse les pauvres d’être irresponsables et vecteurs de la propagation du virus. Dans le même temps, on appelle les entreprises à poursuivre leurs activités, on contraint les ouvriers à aller travailler dans les usines sans protection et on les contrôle pour faire respecter un confinement impossible à suivre (logements insalubres et étriqués, pas de véhicules, difficultés à faire les courses…) !

Amendes et répression pleuvent sur les plus faibles, les plus isolés et les plus démunis. SDF (200 000 en France), sans-papiers, précaires, prisonniers, habitants des quartiers populaires s’en prennent plein la gueule. Mais c’est avant tout pour eux que le confinement et l’impossibilité de se déplacer sont synonymes d’une survie plus dure, plus pénible. Lorsque l’on vit de petits boulots, de tafs au black, en intérim, comme saisonniers… le confinement et les contrôles policiers empêchent réellement de vivre. Sans revenu, l’alternative se résume à survivre en prenant le risque d’attraper le virus ou accumuler les factures, perdre son logement et crever de faim ! Encore un énième accroissement des disparités sociales entre les plus pauvres et les plus aisés !

Il y a réellement deux poids deux mesures : cette propagande est marquée par un profond mépris de classe ! On en a malheureusement l’habitude, notamment depuis 2 ans et le mouvement des Gilets Jaunes. Les dirigeants politiques et économiques nous regardent de haut, ils vomissaient leurs insultes sur les Gilets Jaunes incultes, aujourd’hui ils vont jusqu’à obliger les travailleurs à risquer d’attraper le virus, pour une gloire éphémère et la promesse d’une éventuelle prime. Mais il est vrai que cela n’a jamais empêché le capital de dormir, pensons à l’amiante, aux usines cancérigènes, aux pesticides…

La grande incantation de Macron sur l’unité nationale pour faire face à la pandémie n’est qu’un énième leurre ! Comment est-il possible de penser que, même en période de pandémie, leurs intérêts et les nôtres sont les mêmes ?!

L’État nous serine le beau discours de l’union sacrée, n’hésite pas à sortir le mot « guerre » et à souhaiter la loi martiale (couvre-feu, interventions de l’armée, etc). Il transforme les travailleurs et les travailleuses de santé en héros de guerre qui n’ont besoin de rien, ni d’augmentations de salaire, ni de moyens pour faire face à l’épidémie. On sait bien que les médailles et les statues n’ont jamais nourri ni sauvé personne !

La pandémie est internationale (comme son nom l’indique). Ce ne seront pas des mesures nationales ni une prétendue unité patriotique – qui au passage, a toujours servi les plus riches ! – qui permettra de sortir de cette crise.

Mesures de recul social (loi d’urgence sanitaire et ordonnances), fermeture des frontières et appel à l’union nationale, mesures liberticides (couvre-feux, contrôle des téléphones envisagé, déploiement policier et militaire, utilisation de drones, etc.) : tout cela correspond à une situation économique déjà désastreuse qui va encore s’aggraver.

Ne nous ne trompons pas. La culpabilisation individuelle sert surtout à cacher les responsabilités du capitalisme et l’incurie des États : nous voyons bien qu’ils préfèrent la répression à la prévention sanitaire…

Pour autant, réclamer le « grand retour de l’État » comme solution à cette gestion désastreuse de la crise sanitaire actuelle est bien vide de sens : l’État est ce qu’il est, un outil au service de la classe dominante ! Il restera le gestionnaire servile des intérêts économiques des plus riches, de ceux qui possèdent les entreprises, et en aucun cas un État providentiel qui nous protégerait des épidémies, de la rapacité des méchants boursicoteurs, de la misère.

Mais la défiance vis-à vis de l’État mène parfois à une vision complotiste du monde et de la situation actuelle en particulier. Ne nous laissons pas envahir par la peur ! Ne tombons pas dans le piège des théories trop faciles et farfelues pour tenter de trouver une explication à cette pandémie (ce sont les États-Unis, la Chine ou l’État islamique qui ont envoyé ce virus, ou bien c’est la 5G qui pollue nos cellules en nous infectant, ou encore c’est un coup des industries pharmaceutiques pour vendre un nouveau vaccin — même s’il est évident que ces derniers vont en tirer profit).

Il est possible qu’un virus s’échappe d’un labo mais ce ne serait qu’une série d’incompétences humaines lié à l’arrogance de bureaucrates et de scientifiques persuadés d’être dans la maîtrise. Aucun État n’a d’intérêt dans une telle pandémie, tout simplement parce que ça met à l’arrêt la consommation et l’activité économique et donc les profits capitalistes.

Nous devons avoir une analyse rationnelle du monde qui nous entoure, basée sur des éléments concrets, que nous pouvons cerner pour combattre le système. En nous détournant des réelles causes, ces idées simplistes ne font que nous détourner des luttes sociales, nous privent de perspectives et nous isolent.

En pensant dévoiler les mystères d’une société capitaliste pourtant assez transparente dans ses objectifs elles ne désignent que des boucs-émissaires (étrangers, juifs, francs-maçons…) ou pointent des cibles extérieures et inaccessibles (extraterrestres, CIA, Mossad, RG, sociétés secrètes toutes puissantes…).

Alors ne prenons pas le risque d’une guerre de tous contre tous, où de nouvelles haines se répandraient comme à d’autres périodes épidémiques. Notre ennemi avance sans même plus prendre la peine de feutrer ses pas.

Face à ses attaques qui n’en sont qu’à leurs débuts, il est plus que jamais nécessaire d’être solidaires entre nous, ne nous laissons pas diviser ! Notre solidarité est notre force et le seul moyen de changer le présent et l’avenir !

Face à la crise économique et à la casse sociale : Révolution !

Cette crise sanitaire ne surgit pas dans un ciel serein.

La crise économique de 2008 est passée par là, mettant en péril le système bancaire mondial, plongeant plusieurs pays dans une violente récession (ralentissement de la croissance économique et chute du PIB) et jetant des millions de personnes dans la misère. Cette crise n’était qu’un prolongement d’une autre plus profonde qui remonte à 1974 ; le choc pétrolier se prolongeait alors par une crise de surproduction (la production s’accroissant pour générer un profit toujours plus grand, elle finit par dépasser les possibilités financières des consommateurs, les profits stagnent, ce qui cause faillite et chômage). Face à ces crises, les politiques gouvernementales s’attaquent à nos conditions d’existence : pour permettre aux acteurs de l’économie de maintenir leurs profits, il faut baisser le coût du travail, baisser les salaires directs et indirects (aides sociales, sécu, retraites…).

En France, les gouvernements qui se sont succédés ont tous suivi cette logique d’austérité. Ils ont baissé les cotisations patronales et subventionné les entreprises (CICE par exemple : 100 milliards de crédit d’impôts) afin d’augmenter les bénéfices et les dividendes des actionnaires. Pour « équilibrer » le budget de l’État (conséquence des milliards accordés aux banques suite à la crise de 2008 notamment), ils ont rogné sur les aides et redistributions sociales et les dépenses pour les services publics. Notons qu’au passage, tous ceux qui étaient rentabilisables ont été optimisés puis privatisés. Pour diminuer la dette, les gouvernements prennent aux travailleurs, aux chômeurs, aux retraités, aux intermittents, aux étudiants pauvres… et continuent de multiplier les cadeaux aux capitalistes !

Ces politiques d’austérité ont notamment touché les moyens mis à disposition des hôpitaux. Les données de l’OCDE sont éloquentes. Alors qu’en 1997, la France comptait 4,35 lits d’hôpitaux (hors psychiatrie) pour 1 000 habitants, en 2017, elle n’en comptait plus que 3,1 pour 1 000. C’est moins que la Grèce, sans parler de l’Allemagne qui en compte deux fois plus (6 pour 1 000). En Corée du Sud, le taux est passé au cours de la même période de 3,6 à 7,1 lits pour 1 000 habitants. En nombre de médecins, le rapport n’est pas plus brillant : la France compte 3,4 médecins pour 1 000 habitants, alors que l’Allemagne en compte 4,3 et l’Autriche 5,2.

Une pénurie organisée qui se traduit aujourd’hui par de cruels manques de moyens dans les hôpitaux et des déserts médicaux dans les zones rurales, périphériques et les villes pauvres. Nous payons les restrictions budgétaires appliquées au système de santé par tous les gouvernements depuis plusieurs décennies.

Nos solidarités suppléent à l’incurie d’un État qui dans une dynamique de rentabilité a volontairement détruit des dispositifs mis en place pour prévenir de telles crises sanitaires. Par exemple, l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus), mis en place en 2007, suite à la crise du H5N1 et qui devait fournir masques et équipements de protections, a été démantelé au milieu des années 2010.

Malheureusement, tout cela n’est pas près de s’arranger : alors que la pandémie est encore en cours et ne sachant quelle forme le « déconfinement » prendra, nous voyons déjà poindre une crise économique au moins de l’ampleur de celle de 1929.

Les travailleurs sont encore en partie confinés. La production tourne au ralenti. Des secteurs entiers sont à l’arrêt. Les frontières se ferment. La circulation des marchandises est entravée. Les bourses dévissent partout dans le monde. Le PIB a déjà perdu plus de 8 points en France, soit une baisse inconnue depuis la deuxième Guerre mondiale !

Les États sortent le portefeuille pour éviter l’effondrement de l’économie et du système financier. Trump annonce un plan de 2000 milliards de dollars. La BCE (Banque Centrale Européenne) près de 1000 milliards d’euros, le gouvernement français déjà plus de 100 milliards. Il faut sauvegarder l’économie quoi qu’il en coûte !

Cet argent va avant tout servir à renflouer les portefeuilles des actionnaires et des banques. C’est sur notre travail et dans nos poches que ce sera volé !

La gestion du chômage partiel et technique en fait partie. Le gouvernement organise un fonds d’aide aux entreprises (déjà un milliard pour ce mois-ci) afin de prendre en charge le chômage technique ou partiel. C’est-à-dire que l’État (nos impôts) payent le chômage technique à la place des entreprises qui, elles, seront remboursées… Ce n’est pas pour nous offrir des vacances tous frais payés mais pour nous maintenir en état de reprendre le boulot dès qu’ils l’exigeront. Et au final, c’est nous qui payerons !

Et dans le même temps, Macron, le gouvernement et tout l’appareil de l’État ordonnent de continuer de produire des marchandises. Des secteurs d’activité se sont arrêtés ou ont subi de gros ralentissements. Évidemment ceux qui ne pouvaient vendre leur service suite à la mise en confinement de la population (restauration, hôtellerie, transports dans une moindre mesure…), mais aussi de nombreux secteurs de production « non essentiels » comme l’industrie automobile ou aéronautique, le bâtiment… Pour limiter l’impact de ces nombreux arrêts de production sur l’économie, l’État et le patronat cherchent à nous remettre au travail le plus vite possible. Certains secteurs ont subi des réquisitions pour les contraindre à travailler alors que le minimum sanitaire n’était pas assuré (chauffeurs routiers). De nombreux rapports de force ont lieu, au moins pour obtenir la garantie de conditions permettant la sécurité des travailleurs. En l’absence de combativité collective on a pu voir des patrons faire signer des décharges en cas de contamination avant de retourner au boulot. Le secteur agricole a connu des problèmes de main d’œuvre. Habitué à faire appel à des travailleurs des pays pauvres de l’Europe ou sans papiers qu’il sous-paye, le confinement l’en a privé. L’État a donc fait appel au volontariat et évoqué de réquisitionner les demandeurs d’asile, ceux-là même à qui l’on interdit de travailler en temps normal.

Les ordonnances prises le 25 mars 2020 et par la suite, « aménagent » le droit du travail  ! Elles permettent dès aujourd’hui, pour faire face à la crise, d’augmenter la pression sur les travailleurs et de réduire nos leurs droits : augmentation du nombre d’heures supplémentaires autorisé et baisse de leur rémunération, augmentation de la durée quotidienne de travail, diminution des congés payés, liberté donnée aux employeurs d’imposer des jours de repos… Ils cherchent à baisser le « coût » du travail (nos salaires quoi!) pour maintenir leurs profits (d’ailleurs les dividendes continuent de tomber malgré la crise mondiale !). Au final, ce sont nos revenus qui vont stagner, les cadences et le temps de travail qui vont augmenter, et avec l’inflation (l’augmentation des prix), nous aurons de plus en plus de mal à survivre. Et pour compléter, ils limiteront encore plus les droits sociaux (chômage, retraites, allocations familiales…).

Autrement dit on va nous presser jusqu’au bout pour éponger les déficits. C’est une nouvelle étape de ce que nous connaissons depuis au moins 20 ans. Tout cela va-t-il vraiment relancer l’économie ? Ce qui est sûr c’est que cela va accentuer la concurrence entre capitalistes pour une course aux profits toujours plus féroce (comme en temps de guerre les plus charognards sauront en tirer avantage) et favoriser la concentration du capital, c’est-à-dire la faillite des plus petites entreprises, et l’accumulation du profit dans les mains des plus grandes. L’État accompagnant ce processus vient essentiellement en aide aux grosses entreprises. Le prix à payer sera encore la santé et plus généralement nos conditions de vies de travailleurs ou de chômeurs !

L’épidémie passée, on aura des séquelles.

Sans réaction de notre part, l’État ne se privera pas de maintenir toutes ces mesures qui nous rendent la vie de plus en plus difficile. Parce qu’encore une fois, son but est simple : relancer le business, maintenir les profits des actionnaires et des patrons, assurer la continuité du système capitaliste.

Dans le chaos planétaire que provoque cette pandémie, les États et les capitalistes cherchent malgré tout à sauver leurs profits et profiter de la crise sanitaire et économique pour développer de nouvelles formes d’exploitation (télétravail, atomisation des travailleurs et distanciation sociale, recours au chômage partiel…). Tout au moins à ne pas trop y perdre. Dans « le monde d’après », la crise ayant rebattu de nombreuses cartes, il s’agira pour chaque État et chaque capitaliste de s’en sortir mieux que les autres. L’enjeu étant de taille, ils n’auront aucun scrupule à violemment accentuer la pression sur tous les travailleurs, chômeurs ou retraités de la planète.

Déjà, nous sommes toujours plus nombreux à subir cette pression chaque jour plus fort. La pandémie et la crise économique qui commence ne vont faire qu’empirer nos conditions de vie. Les États s’inquiètent de possibles soulèvements qui pourraient se déclencher à la sortie du confinement (un rapport des renseignements territoriaux alerte le gouvernement sur cette possibilité). Depuis quelques années, des révoltes éclatent de plus en plus régulièrement à travers la planète (Hong Kong, Irak, Amérique du Sud, Algérie, France…). La misère se transforme en colère. En France, le mouvement des Gilets jaunes a démontré comment, ensemble et déterminés, nous pouvons être forts et imaginatifs. Le système capitaliste, lui, n’est pas aussi solide qu’il veut nous le faire croire. Cette pandémie nous le révèle tristement.

Nous seuls avons les capacités de l’abattre et d’imaginer une autre société, solidaire et égalitaire.

À bas le contrôle social pérennisé

Les États savent bien que de tels reculs de nos conditions d’existence, surtout mis en place aussi rapidement, vont nécessairement provoquer des résistances et des révoltes.

Ils se doivent de préparer les mesures pour endiguer ces réactions populaires. Ça tombe bien : le capitalisme sait faire feu de tout bois. Comme ils l’ont fait à d’autres occasions (terrorisme, guerres…), la crise sanitaire actuelle leur offre une nouvelle opportunité pour renforcer et expérimenter ses dispositifs de contrôle sur les populations.

Nombre de mesures de l’état d’urgence actuel sont beaucoup plus claires quand on comprend les réels objectifs des gouvernements : maintenir l’économie au détriment des populations et renforcer l’ordre policier pour s’assurer que tout le monde accepte cette priorité. Face au coronavirus, on surveille de plus en plus, et on teste toujours aussi peu. C’est la réalité d’un état d’urgence dont les mesures sanitaires se déclinent concrètement en mesures sécuritaires.

Il y a quelques semaines, se retrouver en manif un samedi après-midi pouvait nous valoir une contravention pénale. Aujourd’hui, avec le confinement et l’état d’urgence « sanitaire », il suffit de sortir de chez soi pour tomber dans l’illégalité. Les mesures de couvre-feu se multiplient sans qu’on sache exactement à quoi elles servent. L’idée d’un contrôle des populations par traçage des téléphones est sérieusement envisagée ; elle a été appliquée dans plusieurs pays (Chine, Italie, Corée du Sud, Japon, etc.). Les bracelets électroniques pour garantir la quarantaine sont à l‘étude. L’utilisation de drones, qu’on n’avait vu jusqu’à présent que dans les cités ou dans les manifestations de Gilets Jaunes, se développe. Ce qui se passe n’est pas un mauvais film de science-fiction !

L’utilité sanitaire de ces mesures liberticides est très relative : il y a réellement deux poids, deux mesures.

D’un côté, toute sociabilité familiale, amicale, sportive, associative est prohibée. Même une simple promenade est limitée à un périmètre restreint et ne doit pas être partagée à plusieurs.

De l’autre, les travailleurs sont envoyés sans protection à la chaîne, dans les ateliers, au volant ou dans les champs. Les SDF sont traqués et les campements de migrants expulsés sans solutions de rechange ou largement insuffisantes. Des millions de personnes sont confinées dans des espaces beaucoup trop petits (au moins d’un point de vue sanitaire, tant viral que mental) alors que Brigitte Macron se plaint de son confinement dans le palais de l’Élysée !…

L’État freine, bloque ou impose un contrôle sur toutes solidarités, toutes initiatives. La moindre distribution de nourriture doit être validée par la préfecture ! Pourtant les solidarités pourraient grandement améliorer le quotidien de nombreuses personnes, et en particulier des plus précaires et des plus fragiles.

Le discours guerrier, voire militariste de Macron, est révélateur de la perspective dans laquelle il se place. La guerre que ces dirigeants mènent reste avant tout une guerre sociale contre notre classe, celle des exploités et des « auto-exploités ». Préparer le terrain avec une rhétorique martiale n’annonce rien d’autre qu’une répression féroce de toute résistance, individuelle ou collective.

Il semble peut-être difficile d’imaginer pouvoir manifester, se rassembler, discuter à plusieurs pour construire des luttes à l’heure actuelle. Cependant nous n’allons pas avoir le choix. Au-delà de la première phase de confinement, des mesures de distanciation sociale vont continuer à s’imposer. Malgré cela, se retrouver, se rassembler et s’organiser va devenir une nécessité : personne n’est fait pour vivre enfermé ni accepter toujours plus d’exploitation ! Ils ne nous empêcheront pas de lutter ! Organisons-nous pour l’après confinement ! #pasderetouralanormale

Le contrôle social a ses limites : les nôtres !

Ces mesures de confinement nous isolent et nous poussent à la méfiance. Les autres peuvent être porteurs du virus… La peur bat son plein et est largement alimentée par les discours des politiques et des médias.

Dans cette situation on voit se développer de nouveaux types de rapports sociaux potentiellement encore plus mortels : isolement, peur, xénophobie, travail atomisé… La solidarité est mise en difficulté et avec elle nos capacités de lutter. Mais cette situation fait apparaître aussi la nécessité de l’entraide et particulièrement pour les plus précaires et les plus démunis. C’est sur cette force construite sur la nécessité que nous devons compter pour résister et espérer un monde meilleur.

Refusons la pérennisation du contrôle social, multiplions dès à présent les luttes, participons à celles qui existent ! Préparons l’explosion sociale de l’après confinement !

Comment lutter et être solidaire dans cette situation d’urgence sanitaire ?

Face à cela nous n’avons guère de choix, nous ne pouvons pas les laisser faire. Soit nous subirons toujours plus la misère, l’exploitation et la répression, soit nous résistons et reprenons la lutte.

Bien qu’on n’en entende pas parler, nombre de droit de retrait, de débrayages, voire de grèves sauvages ont fleuri dans les usines qui refusaient de sécuriser les travailleurs, en Italie, en Espagne, aux États-Unis comme en France. Dans les chantiers navals ou le bâtiment, en passant par les gros centres de productions de l’industrie automobile, les hangars d’Amazon, les livreurs en fourgonnette ou à vélo, les éboueurs… nombreux sont ceux qui n’ont pas attendu les syndicats pour exiger plus de protections et de meilleures conditions.

Dans le sud de l’Italie, miné par le chômage et la misère et particulièrement fragilisé par le confinement et l’épidémie, des autoréductions (sortir d’un supermarché à plusieurs sans payer) ont été organisées. On peut voir dans plusieurs secteurs, régions ou pays un mécontentement s’exprimer de plus en plus fort, particulièrement pour les couches sociales les plus pauvres, pour qui le confinement n’est tout simplement pas tenable. Des grèves de loyers sont envisagées dans plusieurs pays et notamment aux États-Unis, ainsi que des refus de payer les factures. Sur presque tous les continents, les révoltes éclatent dans les prisons face à une situation désastreuse tant d’un point de vue sanitaire que purement humain… Et dans les quartiers populaires, où les pressions économique et policière passent encore un stade, la révolte gronde et commence à éclater.

Des luttes existent, commençons dès à présent à les soutenir !

Partons des multiples réseaux que nous construisons, des solidarités que nous avons mises en place, des combats que nous menions avant cette pandémie. Il nous faut mener la lutte ensemble, à l’image du mouvement Gilets Jaunes, détachée des intérêts spécifiques et corporatistes mais pour une remise en question globale de la société. Contre les attaques sur les aides sociales, le droit du travail, face aux carences du système de santé ou à l’abandon dans lequel se retrouve la plupart de nos anciens, il ne faut pas agir séparément. C’est par une lutte globale qui vise une transformation profonde de la société, que nous pourrons en finir avec la barbarie capitaliste et ses atrocités (pandémie, catastrophe écologique, guerre, chômage, exploitation, misère, dictature…la liste est malheureusement bien plus longue !).

Subir une telle perturbation de nos vies peut permettre dans le même temps de remettre en cause notre quotidien : la « normalité » du chef qui nous gueule dessus, celle d’aller travail pour enrichir son patron ou du spectacle absurde répandue dans les médias, l’acceptation des politiques gouvernementales, la résignation face à la misère… Cette constatation peut nous amener collectivement à envisager d’autres modes d’organisation sociale.

Pour l’instant, nous avons besoin de moyens pour rompre l’isolement au-delà du confinement, des moyens inventifs de s’organiser en prenant en compte les mesures sanitaires qui risquent de se prolonger…

Il est essentiel aujourd’hui de faire tourner les informations sur nos conditions d’existence, de travail, nos situations familiales et personnelles (violences familiales, difficultés morales et psychiques, besoin alimentaire, fragilisation du droit à l’avortement …) et d’organiser partout où cela est possible des luttes contre les attaques dont nous sommes les cibles.

Dans l’immédiat, il est possible de s’organiser collectivement pour les courses, d’acheminer des produits aux personnes isolées, d’organiser ou de participer à des maraudes pour les plus démunis… Et pourquoi pas des réquisitions collectives de denrées essentielles, des autoréductions ? Face à la situation actuelle nous sommes nombreux à avoir encore plus de mal que d’habitude pour finir le mois. Dans certains pays des grèves de loyer ou de paiement des factures s’organisent. Emparons-nous aussi de ces moyens d’action !

Tenons-nous informés de ce que nos voisins vivent, de ce qui se passe dans telle ou telle usine, entreprise, exploitation agricole… afin de trouver des moyens collectifs de lutte contre les heures sup’ forcées ou non payées, contre l’obligation de poser nos jours de congés, contre le manque de protection au travail ou l’obligation de travailler. Mais il s’agit aussi de la question du paiement des primes, des cadences et des salaires. C’est d’autant plus à nous de lutter pour nos conditions de travail qu’on ne peut même pas espérer compter sur les Prud’hommes fermés ou les centrales syndicales, quasi inaudibles en ce moment et prêtes à de nombreuses concessions sur le dos des travailleurs pour relancer l’économie, la production et par là retrouver leur rôle de « partenaires sociaux ».

Dans cette situation qui dure depuis déjà trop longtemps nous devons continuer à réfléchir collectivement, à échanger sur la situation et à chercher des possibilités de luttes et de résistances. En attendant de pouvoir se retrouver, il est possible d’organiser des assemblées virtuelles sur internet (ou par l’intermédiaire d’une radio), voire physiques, de balcon en balcon comme en Italie par exemple. La diffusion de réflexions et de critiques est aussi important dans le contexte actuel (distributions de tracts dans les boites aux lettres de son quartier, de son pâté de maisons, collage d’affiches, affichage de banderoles)… Réinvestir la rue tout en respectant la distanciation sociale peut aussi se tenter (manif en voitures, à vélo, rassemblements…). Et dès la fin du confinement reprenons la lutte pour de bon !

Si les solidarités, les luttes vitales et immédiates sont indispensables aujourd’hui, il nous faut déjà penser « l’après ». Pointons dès maintenant les contradictions de ce système qui, à travers cette crise sanitaire, apparaissent encore plus violemment.

Entre d’un côté les énormes moyens de production, la quantité de richesses produites, les moyens techniques, les connaissances scientifiques et de l’autre l’incapacité à faire face à une crise sanitaire qui reste faible au regard d’autres épidémies dans l’histoire (Peste Noire, grippe espagnole…), la contradiction est éclatante ! Et ce n’est qu’à l’image de l’organisation sociale et de la répartition des richesses…

Lorsque les dirigeants ne peuvent plus et que nous, les classes populaires, ne voulons plus, la révolution n’est plus loin !!!

Nous ne sommes pas seulement en guerre contre un virus mais contre le système qui est incapable de le combattre et qui l’a favorisé. Encore une fois si « Macron nous fait la guerre et sa police aussi », le virus le plus immonde est bien le virus capitaliste ! Derrière la crise sanitaire se cache la guerre sociale et la crise du capital. Et il s’agit pour nous, travailleurs, chômeurs, retraités…, de la mener et de vaincre, pour une société meilleure, plus juste, débarrassée du profit et des classes sociales, de l’État, des frontières et des polices, de l’argent et de l’exploitation…

« On est là » et on y sera encore et toujours !

#pasderetouralanormale

Des GJ, révoltés et confinés, déters et solidaires

gj_ales@riseup.net

defcolgj@riseup.net

Besoin de soutien – Ecrire aux prisonniers

Un camarade GJ a besoin de soutien. En prison à Villeneuve les Maguelonne, il se sent isolé et manque d’argent.

Nous vous invitons à lui écrire :

Nous vous invitons aussi à suivre le groupe facebook « un petit mot, un sourire « où écrire à nos condamnés » qui recense et publie les numéro d’écrou de prisonniers qui ont donné leur accord.

Si vous souhaitez aider financièrement des prisonniers, le mieux est de nous envoyer de l’argent en précisant l’objectif sur cette cagnotte (d’autres collectifs antirep le font aussi, n’hésitez pas à les soutenir).

Insistons sur le fait que les conditions de détention sont particulièrement dures avec le confinement, l’interdiction des parloirs…

Etat d’urgence sanitaire : l’ordre social, quoi qu’il en coûte

La Défense Collective GJ Cévennes Garrigues a décidé de co-signer ce texte à propos de la situation actuelle. Nous en partageons en effet l’analyse, même si nous ne sommes pas forcément d’accord avec les idées et les pratiques de tous les signataires.
Quoi qu’il en soit, la collaboration et l’échange d’idées nous paraissent importants entre les groupes antirépression, défense collective, legalteam au sein du mouvement Gilets Jaunes mais aussi dans la période actuelle où la répression risque d’être particulièrement forte.
Article là :


État d’urgence sanitaire : l’ordre social, quoi quil en coûte

Depuis le mois de mars on assiste au déploiement d’un arsenal de mesures destiné à enrayer la propagation du covid-19. Bien loin de concerner le seul champ médical, ces mesures impliquent des transformations profondes du fonctionnement des institutions étatiques, et notamment judiciaires. L’état d’urgence sanitaire instaure un État autoritaire, anéantit les droits de la défense et exacerbe le réflexe sécuritaire. Dans ce contexte, les groupes de défense collective et legal teams restent actifs pendant le confinement pour ne laisser personne isolé·e face à la police et aux juges.

Après avoir été niée pendant des semainesi, la dangerosité du covid-19 a donné lieu à un arsenal de mesures destiné à enrayer la propagation de la maladie. Bien loin de concerner le seul champ médical, ces mesures impliquent des transformations profondes du fonctionnement des institutions étatiques, et notamment judiciaires. Depuis la publication de la loi du 23 mars 2020 qui prévoit les conditions de l’état d’urgence sanitaireii (EUS) et son instauration le même jouriii, et plus encore depuis qu’une ordonnance a précisé les « adaptations » de la justice pénale à la crise sanitaireiv, des voix se sont élevées pour dénoncer ce qui est appréhendé comme une dérive de l’État de droit. On peut se réjouir de constater une réaction plus franche après quelques jours de sidération collective. Mais on peut aussi, à l’inverse de l’idée de dérive, analyser l’état d’urgence comme un moment de quintessence de la justice d’État, c’est-à-dire un moment où elle apparaît dans sa forme condensée, dans sa forme la plus explicite, celle qui ne s’embarrasse plus d’aucun atour démocratique pour s’affirmer nue.

Du « quoi qu’il en coûte » martelé lors du discours présidentiel du 16 mars, il serait naïf de retenir la promesse de largesses budgétaires sans contreparties. Il fallait plutôt comprendre que, quoi qu’il en coûte, l’État imposera son ordre économique et social, même s’il faut en passer par une suspension des droits les plus fondamentaux, par une terrible régression sociale, par une paupérisation massive. L’état d’urgence n’est pas le confinement, loin de là. Il ne durera pas ce que le confinement durera, loin de là. L’état d’urgence sanitaire n’implique pas qu’une modification de nos quotidiens pour la protection de notre santé collective. Il implique aussi l’instauration d’un État autoritaire pour la sauvegarde de l’ordre social en perspective de l’offensive capitaliste annoncée.

Instauration d’un nouveau régime

Les effets de la loi du 23 marsv sur la vie quotidienne ont été abondamment commentés dans les médias, sur les réseaux sociaux : distanciation sociale, interdiction de tout déplacement sauf dérogation, réglementation des transports, interdiction de tout rassemblement, réunion ou activité collective (dont religieuse et politique), fermeture des établissements scolaires, réquisition de biens et de personnes, possibilité de mise en quarantaine, de placement ou isolement des personnes affectées. Les conséquences de la loi du même jour sur le fonctionnement des institutions n’ont par contre pas été particulièrement soulignées. Celles d’une validation des entorses à la constitution par le Conseil constitutionnel lui-même non plusvi. Réduire les enjeux de l’EUS aux modalités du confinement évacue toute critique conséquente de la gestion de la crise. Car cette loi concerne bien plus que la santé. Elle met en place un régime politique qui n’est malheureusement pas inédit. Lorsque les pouvoirs sont concentrés dans les mains de l’exécutif et qu’il peut en user de manière discrétionnaire cela porte un nom, même si cela heurte les mythes du pays des droits de l’homme et de l’Europe de la démocratie.

Alors qu’il existe déjà des dispositions du Code de la santé publique pour accorder des pouvoirs spéciaux au ministre de la Santé en cas de catastrophe sanitaire, le gouvernement a choisi d’instaurer un nouveau régime d’exception pour avoir toute latitude à réglementer dans un très grand nombre de domaines de la vie sociale, économique, politique et juridique. Avec la loi du 23 mars, l’exécutif est autorisé à gouverner par ordonnances. 42 textes ont été ainsi adoptés entre le 25 mars et le 15 avrilvii. Sans aucun débat. Un peu comme un 49-3 permanent mais en prime sans aucune consultation du Parlement. Ce n’est pas qu’on comptait beaucoup sur ce dernier pour nous défendre mais il est tout de même significatif qu’il soit rendu muetviii et que soit mis fin à la séparation des pouvoirs exécutifs et législatifs. Localement, le rôle des préfets est conforté, puisque c’est à eux de faire appliquer et de moduler les mesures décidées par le gouvernement –pour exemples le confinement renforcé en Alsace le week-end de Pâquesix ou les tentatives de réquisitions de milices de chasseurs en Seine-et-Marne début avrilx. Dans la rue, c’est la police qui décide de manière arbitraire si nos déplacements sont légitimes ou non, sans qu’aucun texte ne précise les conditions de l’infraction au non-respect du confinementxi et sans que les tribunaux de police puissent statuer en cas de contestation : désormais toute personne dans la rue est délinquante sauf preuve du contraire, ou plutôt sauf acquiescement aléatoire des flics. Un blanc-seing leur est donné pour les contrôles abusifs et les violences, surtout dans les quartiers populaires où les brutalités habituelles de la police se sont intensifiées. En outre, la répétition de verbalisations est devenue un délit, ce qui est parfaitement contraire aux règles du droitxii.

Ce régime d’exception s’inscrit dans le droit au-delà de la durée du confinement, et au-delà de la durée de l’état d’urgence sanitaire. Le 23 mars, l’EUS a été décrété pour une durée de deux mois, par dérogation d’ailleurs au régime tout juste créé. Mais il pourra être renouvelé sur tout ou partie du territoire. Il pourra aussi être levé puis instauré à nouveau si besoin. Autant de fois que le gouvernement l’estimera utile et ce jusqu’au 1er avril 2021, voire plus si la loi est prorogée, c’est-à-dire maintenue. Et en dehors des périodes d’état d’urgence, le ministre de la Santé garde le droit d’édicter des mesures de restriction de libertés, collectives mais aussi individuelles, jusqu’à « disparition durable de la crise sanitaire ». Hors des périodes d’état d’urgence, nous resterons donc encore dans l’exceptionnel. Et après l’urgence et l’exceptionnel, rien n’empêchera que le Parlement revenu à ses fonctions ordinaires pérennise certaines des dispositions de l’EUS. Ainsi, à peine le sabordement du droit du travail prononcé par ordonnance le 25 mars, le patron du Medef appelle à une extension générale du temps de travail. Jusqu’au 31 décembre, de nombreux secteurs seront renvoyés à des conditions qu’on croyait dépassées. Journées de 12h, semaines de 60h, suppression de RTT, de congés, l’ordonnance sur le travail montre qu’il n’y a pas un sens de l’histoire qui nous mènerait vers le progrès mais toujours une lutte de classe à mener pour ne pas se faire dévorer davantage. Et après le 31 décembre, que se passera-t-il ? Tout porte à croire que la crise économique qui avance sous le linceul du covid-19 sera le prétexte parfait pour exacerber l’exploitation.

Des droits de la défense anéantis

L’instauration d’un nouveau régime est un choix politique, non une fatalité virologique déterminée par la catastrophe sanitaire. La culpabilisation et la répression à l’encontre des classes populaires ne suffisent pas à masquer les dénis du gouvernement, ses mensonges, sa gestion mortifère, l’absurdité de ses consignes contradictoires, non plus la mesquinerie de ses politiques budgétaires, la férocité de ses réformes, sa logique de privatisation à tout va. Il est des mesures prises qui ne peuvent en aucun cas se justifier par la prévention sanitaire mais qui servent sans aucun doute une stratégie de domestication de la population. Il en est ainsi de l’ordonnance qui modifie les règles de procédure pénalexiii. Durant les périodes d’EUS et un mois au-delà, les délais de prescription sont suspendus, les délais de voies de recours sont doublés et surtout les conditions des GAV, des jugements et des détentions sont complètement transformées. En quelques jours, les droits de la défense ont été anéantis à toutes les étapes du parcours judiciaire, de l’arrestation jusqu’à la sortie de prison. Les tribunaux sont ouverts au minimum, toutes les audiences civiles ou administratives sont reportées, seule la justice pénale, considérée comme essentielle, continue son cours. En d’autres circonstances on pourrait se réjouir de la mise à l’arrêt de la justice d’État, mais là c’est bien sûr aux dépens des arrêté·e·s, des enfermé·e·s, des condamné·e·s. Les institutions judiciaires sont réduites aux plus stricts besoins du pouvoir : celui de punir et d’enfermer.

Il serait trop long de décrire ici l’ensemble des dispositions prises en matière de justice pénale. Pour faire court, mentionnons qu’en garde à vue le droit de s’entretenir de manière confidentielle avec un·e avocat·e peut se résumer à un simple un coup de fil, sans garantie que la police n’écoute la conversation. Pour ce qui est des tribunaux, les jugements peuvent se faire par visioconférence, et même par téléphone. En correctionnelle, un décret constatant la persistance de la menace sanitaire permettra de transformer les audiences collégiales en audience à juge unique. Les détentions provisoires peuvent être prolongées de six mois sans aucun débat contradictoire, c’est-à-dire sans possibilité de se défendre oralement. De fait, de nombreux·ses juges ont prolongé de manière automatique les détentions arrivant à terme, sans même convoquer la personne à une audience. Idem lorsqu’on est assigné·e à résidence. Et si l’on est en prison après avoir été condamné·e, les possibilités de se défendre, que ce soit pour les aménagements de peines, réductions de peines, permissions ou libérations sous contrainte se réduisent à de simples observations écrites. Certain·e·s mineur·e·s ne sont pas épargné·e·s par cette logique de réduction des droits de la défense, bien au contraire : détention provisoire, « mesures éducatives » et placements prolongés, audiences à juge unique, prolongation de garde à vue sans présentation à un magistrat. La sortie anticipée d’environ 5 000 prisonnier·e·s en fin de peine n’est pas un geste de générosité et ne pourra pas compenser l’inflation carcérale que ce gouvernement, comme ses prédécesseurs, a amplifiée.

Concernant le droit des étranger·e·s, c’est encore une réponse sécuritaire au risque sanitaire. Les demandes d’asile sont quasiment suspendues et les délais de recours n’ont pas été adaptés à l’incapacité actuelle des services administratifs à instruire les dossiers, que ce soit pour les demandes d’asile, les placements en rétention ou les expulsionsxiv. Les centres de rétention enferment encore, illégalement, malgré les reconduites à la frontière désormais impossibles, et notamment des personnes maladesxv.

Nos ennemi·e·s n’ont pas changé

Partout en France, et dans les banlieues particulièrement, les révoltes se multiplient et les nuits sont incendiaires. La colère n’en finit pas de monter parmi les cibles ordinaires de la police, parmi celles et ceux que le confinement assigne à la misère, parmi les travailleur·se·s exposé·e·s au virus, parmi nous, toute la population qui savons que, covid ou pas, nous resterons toujours du même côté de la barrière. Face à la déferlante de mesures répressives et de pratiques autoritaires, il est nécessaire de se défendre ensemble. L’objectif de nos collectifs est de ne jamais laisser personne isolé·e face à la police et aux juges. Dans la mesure des moyens dont dispose chaque collectif, nous restons donc disponibles pour contester les amendes de non-respect du confinement, mettre en contact avec des avocat·e·s, accompagner les proches de personnes blessées, mutilées ou tuées par la police. Aujourd’hui, nous nous adaptons à toutes les contraintes qu’impose le confinement et nous nous organisons pour la suite.

Le constat d’un abandon général des principes constitutionnels et des droits fondamentaux interpelle, même si on ne défend ni l’État ni sa justice. Pourquoi lutter contre une maladie devrait inexorablement se traduire par une acceptation du flicage général, une résignation à être dépossédé de tout libre-arbitre, un changement de régime et un durcissement des conditions judiciaires et carcérales ? Alors que, derrière le recours aux technologies pour tracer les contaminations, on voit déjà poindre la banalisation et l’extension de l’exploitation des données personnelles –il n’a cependant pas fallu attendre 2020 pour que la police utilise les données fournies par les opérateurs–, le processus risque fort d’être le même dans tous les domaines. Comme on s’habitue aux dronesxvi, à la vie sociale virtuelle, à l’information médiée par les algorithmes, on s’habitue aussi à vivre sous cloche et sous surveillance. Comme toute loi d’exception, l’EUS sera plus qu’une parenthèse. Au « mieux » il sera un précédent inspirant pour les gouvernants, au pire il sera une phase de transition. Des dispositions de l’état d’urgence de 1955 réactualisé en 2015 sont ainsi entrées dans le droit ordinaire en 2017. Comment ne pas craindre alors que la loi sur l’EUS de 2020 initie de nouvelles lois mais aussi de nouvelles pratiques de gouvernementalité pour les années à venir ? Ce moment n’est pas une faillite du droit, de la justice, de la démocratie mais une démonstration du fait que la loi, retranscrivant les rapports de force existant au sein de la société, peut être modelée en fonction des besoins du pouvoir. Elle formalise un ordre social. Quoi qu’il en coûte.

Ce que permet cet état d’urgence, ce n’est en aucun cas de développer des moyens susceptibles de rompre avec la logique criminelle qui nous a mené·e·s à ce désastre. Le 16 mars, lors de l’allocution présidentielle, nous avons bien entendu la déclaration de guerre et nous savons bien de qui elle provient. Ériger un prétendu ennemi commun, appeler à l’unité nationale, la tactique est éculée et le chantage grossier. S’il y a une guerre qui s’annonce, ce n’est que sur le terrain social et nos ennemi·e·s demeurent les mêmes, avant, pendant et après la pandémie.

24 avril 2020

EUS fin
L’EUS c’est quoi?

Collectifs signataires :

CLAJ, Collectif lillois d’autodéfense juridique : claj(at)riseup.net

La Cabane juridique, Calais : legalshelterviolences(at)gmx.com

Contre la répression organisation collective, Caen : caenantirep(at)riseup.net

Legal Team Paris / Groupe légal de la Coordination antirépression Paris-IdF : stoprepression(at)riseup.net

Anti-Rep rurale de Bure : arr(at)riseup.net

Caisse de solidarité contre la répression, Dijon : caissedeso21(at)riseup.net

Caisse de solidarité de Lyon : caissedesolidarite(at)riseup.net

CASSIS, Collectif d’autodéfense et de solidarité en soutien aux inculpé·e·s stéphanois·e·s : cassis42(at)riseup.net

CAR38, Collectif anti-répression de Grenoble : car38(at)riseup.net

Legal Team Marseille : legalteam-marseille(at)riseup.net

Legal Team Pays Basque : legalteambaiona(at)riseup.net

Ces collectifs font partie du Réseau d’autodéfense juridique collective : https://rajcollective.noblogs.org

Est également signataire aussi : Défense collective Cévennes  Garrigues : defcolgj(at)riseup.net

i Rappelons-nous ce conseil de défense sur le covid qui s’est conclu par un 49-3 sur la réforme des retraites le 29 février et les nombreuses tergiversations sur les masques et les tests.

ii Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19.

iii Décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire. https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041746694&categorieLien=id

iv Ordonnance portant adaptation de règles de procédure pénale sur le fondement de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19.

v Décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire. https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041746694&categorieLien=id

vi Pour une analyse de la décision du Conseil constitutionnel du 26 mars 2020 sur la loi organique du 22 mars 2020 : https://blogs.mediapart.fr/paul-cassia/blog/270320/le-conseil-constitutionnel-dechire-la-constitution

xi 4e alinéa de l’article L. 3136-1 du code de la santé publique. https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041746313&dateTexte=20200327

xii L’amende pour violation du confinement est de 135 euros la première fois, 200 euros en situation de récidive dans les 15 jours. Si la verbalisation, qui n’équivaut pourtant pas à une condamnation définitive, se répète plus de trois fois en 30 jours, le tribunal correctionnel peut condamner à 6 mois de prison et 3 750 euros d’amende. https://www.nextinpact.com/news/108893-le-delit-violations-repetees-confinement-attaque-toutes-parts.htm

xiii Ordonnance portant adaptation de règles de procédure pénale sur le fondement de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19.

xiv Article 9 de l’ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020 portant diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l’épidémie de covid-19.

xv Pour exemple à Vincennes. En application du protocole ministériel du 17 mars et de l’ordonnance de référé du tribunal administratif de Paris du 15 avril, l’administration devrait lever la rétention et orienter les retenus infectés dans un centre géré par l’Agence régionale de santé (ARS) s’ils n’ont pas de domicile. Mais l’ARS refusant de gérer les sortants de prison au motif qu’il existerait un risque de trouble à l’ordre public, la préfecture transforme le CRA en centre de confinement pour sortants de prison.

xvi Le 12 avril, le ministère de l’Intérieur a d’ailleurs lancé un appel d’offre pour 565 « micro-drones du quotidien », 66 drones « de capacité nationale » et une vingtaine de « nano-drones spécialisés. https://www.boamp.fr/avis/detail/20-51423/0

La peste et la colère

Nous relayons ici un article de Charles Reeve paru le 13 avril 2020 et qui porte sur la situation actuelle d’épidémie et de confinement. Son analyse si elle s’écarte un peu des questions d’antirépression qui sont les notres, nous semble tout de même très importante. Une telle analyse peut en effet nous aider à comprendre où nous sommes et ce qu’il est possible de faire maintenant en termes de luttes et de changement radical de société.

La Peste et la Colère

« Ce que nous vivons aujourd’hui est un temps suspendu qui nous est imposé, qui n’est pas le fruit d’une action autonome d’opposition au monde. » Par Charles Reeve.

paru dans lundimatin#238, le 13 avril 2020

Comment croiser et faire entrer en résonnance les réflexions sur l’étrange et singulière période que nous vivons ? Une période qui, par son côté tragique, met en relief les faiblesses et les limites du système capitaliste mondialisé, faiblesses qui, hier encore, passaient pour l’expression de sa force et de sa puissance.

Soumis aux discours toxiques, distillés en boucle, nous sommes cloués au présent par une atmosphère anxiogène, nous sommes impuissants, du fait même de notre isolement. Nous nous sentons menacés par un environnement où tout objet ou individu est perçu comme hostile, source de mort. Les relations humaines elles-mêmes sont minées par le danger. Les chiffres et les courbes des « spécialistes » de la mort sont suivies comme celles de la Bourse, nous submergent et nous accablent ; elles s’ajoutent aux explications complotistes, aux spéculations et aux prétendues certitudes qui se veulent rassurantes. C’est dans ce magma que l’esprit critique doit se frayer un chemin. C’est en essayant de l’exercer que nous accéderons à la seule issue vers l’air libre et que nous nous élèverons au-dessus de la démission de la pensée devant la peur.

Le refoulement de l’idée de la mort paraissait bien consolidé dans les sociétés riches, effacé par le culte du bien-être et par le mythe du progrès, de l’individu dominateur de la nature. Or La tempête du progrès n’est que destruction du vivant — ce que craignaient, déjà il y a un siècle, les ennemis de l’idéologie productiviste dont Walter Benjamin et d’autres « pessimistes » émancipateurs.

La fragilité de la vie et des sociétés avait été allouée aux peuples de la pauvreté, dans les territoires sans cesse élargis de la barbarie guerrière, dans les sociétés en attente des fruits de ce terrible progrès. La production de la mort était devenue une image consommable, source de révolte, certes, mais lointaine. La consolidation du sentiment de sécurité n’avait cessé d’être renforcée par les murs de la répression et de la xénophobie des sociétés riches. La figure du réfugié, les dizaines de milliers de noyés de la Méditerranée, nous le rappelaient tous les jours. Puis, sans crier gare, le virus a contourné les moyens policiers, les murs et les frontières, et s’est imposé parmi nous. Il a finalement pris le chemin le plus moderne et le plus facile, celui de la circulation marchande des biens et des hommes, y compris — ironie du présent — celle qui s’était déguisée en loisir ludique, le tourisme de masse. « Plus loin, plus vite, plus rien !  » disait un graffiti anar sur les murs de la grande ville. Voilà, nous y sommes : plongés dans le rien. Tout cela, nous le savions, nous étions avertis, nous allions dans le mur. Cette fois, nous y sommes : dans le mur ! Le choc frontal nous abasourdit et nous paralyse. Pourtant, une fois de plus dans l’expérience historique, c’est seulement en se fixant des objectifs de plus grande envergure que nous pouvons tenter de nous arracher à la paralysie et aux peurs, que nous pourrons traverser cette période étonnamment étrange.

Nous sommes sortis de la normalité, la normalité du capitalisme que nous refusions mais à laquelle nous étions obligés de nous soumettre, parfois même au-delà de notre conscience. C’est peut-être là un premier enseignement fort de ce moment, nous faisons tous et toutes partie du système, au-delà des idées de rupture que nous pouvons partager, des pratiques hors-norme que nous pouvons expérimenter. Mais cette sortie de la normalité n’est pas celle que nous avons pu vivre à d’autres moments de l’histoire, la rupture du temps du capitalisme et l’accès à un autre temps produit de l’activité subversive de la collectivité. Ce que nous vivons aujourd’hui est un temps suspendu qui nous est imposé, qui n’est pas le fruit d’une action autonome d’opposition au monde. Cette étrangeté est sûrement une des sources de nos angoisses. Nous vivons une expérience nouvelle qui n’était pas prévisible sous cette forme : « la grève générale du virus », pour reprendre la formule pertinente énoncée quelque part. L’arrêt du « business as usual  » s’est fait sans nous, hors des schémas connus que nous avons toujours envisagés, désirés, et pour lesquels nous avons bataillé. C’est une grève générale de masse sans « masses », pire encore, sans force collective de subversion. Il serait probablement juste de dire que nous vivons une première secousse qui annonce d’autres à venir dans un processus d’effondrement général d’une société organisée à but de profit destructeur. Cet effondrement, étranger qu’il est à toute action collective consciente, n’est pas porteur d’un monde nouveau, de projet de réorganisation de la société sur des bases nouvelles. Il reste encore une création du capitalisme, dans les limites de sa barbarie, sans perspectives autres que celles de l’effondrement. Ici s’arrête toute ressemblance avec la grève générale, création d’une collectivité qui se réapproprie sa force.

Pourtant, le choc qui nous est asséné, annonçant un enchaînement de ruptures dans l’ordre du monde, n’est pas sans rapport avec le fonctionnement du système social dans lequel nous vivons, il n’est pas dissociable de ses contradictions. Les développements récents dans la mondialisation du capitalisme, l’accélération des échanges, la concentration et l’urbanisation rapide et gigantesque des populations, ont accéléré le bouleversement écologique, détruit la fragile reproduction du monde végétal, du monde animal et de celui des humains, brisant les dernières barrières entre eux. L’avènement du capitalisme global n’a pas été la fin annoncée de l’histoire mais il a inauguré une ère nouvelle d’épidémies de plus en plus rapprochées. Après la grippe aviaire, après le SRAS, l’imminence d’une nouvelle épidémie était à craindre, elle était quasiment prévisible. Pourtant, la logique de profit du mode de production capitaliste a impitoyablement poursuivi sa route, et le frein dont il est question dans le « Monologue du Virus  » n’a pas été actionné ; il ne pouvait l’être que par des forces sociales opposées à cette logique et qui peinent à se constituer. Les conséquences de cette logique et de cette impuissance à la bloquer sont devant nous. C’est, il me semble, une piste de réflexion : ne pas séparer la crise virale de la nature du système. Il faut s’opposer aux tentations d’explication faciles qui s’accommodent des limites de ce qui existe, qui cachent mal l’intention de faire repartir la machine. Un bon exemple est celui des délires complotistes en de toutes sortes, dont celui si séduisant du « virus créé en labo ». Si nous savons que la guerre biologique fait partie des projets criminels des classes dirigeantes, si la désorganisation et l’accident, sont inhérents à toute bureaucratie, militaire ou autre, le fait est que la vision complotiste laisse de côté la logique mortifère du mode de production capitaliste. L’explication la plus invraisemblable se fait passer pour la plus évidente. Ce virus fut bel et bien fabriqué, non pas par des pouvoirs occultes mais par le processus destructeur du capitalisme moderne.

On le souligne assez, les mesures de confinement et de privation des libertés sociales et individuelles mettent en relief les rapports de classe. Une fois de plus, cette fois-ci, de façon macabre, l’égalité formelle s’efface devant la criante inégalité sociale. Inégalité que la crise virale accélère. Mais la crise virale révèle aussi la nature du capitalisme moderne, ses contradictions. Le réel du quotidien bouleversé est désormais l’effondrement des systèmes financiers, la débâcle des bourses, la précarité généralisée du travail salarié, la hausse vertigineuse du chômage, un appauvrissement de masse. Bouffée d’air frais : les « économistes », qui avaient relégué au fond du tiroir des objets superflus les concepts gênants de déséquilibre du système, ont quasiment disparu du paysage, confondus par l’inattendu, à court de prévisions. Pendant que des millions de chômeurs s’additionnent aux milliers de morts de la pandémie, les fortunes gigantesques se bousculent pour trouver protection dans les bras de leurs Etats. La planche à billets se remet en marche et l’inflation qu’on nous disait appartenir au passé, pointe son nez. L’après s’annonce déjà comme une deuxième secousse de l’effondrement.

On ne peut s’étonner que l’épidémie du covid-19 et celles qui l’ont précédée aient été générés dans une Chine devenue l’usine du monde, dans des territoires en proie à une destruction sauvage, rapide et massive de la nature. La Chine, usine du monde, est productrice de virus comme elle est productrice de masques, d’appareils d’assistance respiratoire et de dolipranes, etc. C’est un tout.

De par son ampleur globale, planétaire, la contamination virale a très vite débouché sur un blocage des échanges et un écroulement de l’économie, la désorganisation de la production de profit. Une crise entraîne l’autre. L’une renvoyant à l’autre, l’une s’imbriquant dans l’autre. Désormais, tout est global. Et, dans l’espace de deux semaines, ce qui était à peine envisageable est devenu réalité : rien qu’aux Etats-Unis d’Amérique, dans un des centres même de la machine infernale, plus de dix millions de travailleurs se sont découverts chômeurs.

Parmi les questions qui nous interpellent, qui inquiètent, il y a celle de la réponse des pouvoirs politiques sur le terrain des droits formels, de ces contraintes liberticides qui bousculent le cadre juridique de notre existence. L’éventualité d’adopter le « modèle chinois » comme la référence en matière d’état d’urgence s’est dessinée très tôt dans les sociétés européennes pour se concrétiser ensuite dans l’adoption de méthodes, de techniques répressives et de contrôle du quotidien. A cela sont venues s’ajouter des dérogations allant dans le sens d’une remise en cause du Droit du travail. Dans des pays comme le Portugal, le gouvernement socialiste est allé jusqu’à suspendre le droit de grève, permettant à l’Etat « d’avoir les moyens légaux d’obliger les entreprises à fonctionner » [1]

[1] Antonio Costa, premier ministre, déclaration à la…

.

On a, d’expérience, des raisons de craindre que ces formes d’état d’urgence puissent, une fois la crise virale terminée, être « versées dans le droit commun », pour reprendre la formule pudique du « journal de tous les pouvoirs ». D’autant plus que cette « fin », le fameux « déconfinement », risque d’être lente et à rallonges. L’urgence — clamée déjà par toutes les forces capitalistes — d’un nécessaire retour au « business as usual  », justifiera sans doute la perpétuation des « contraintes liberticides ». Un nouveau cadre juridique pour de nouvelles formes d’exploitation. Ce qui veut dire que la seule opposition à ce nouvel état de droit autoritaire sera indissociable de la capacité collective à s’opposer à la reproduction de la logique de production et de destruction du monde qui nous a amenés là où nous sommes.

Cela étant, il reste la question incontournable de savoir si le capitalisme, système complexe puissant et capable de rebondissements inattendus, peut s’accommoder, à la longue, d’un fonctionnement social réglé par des mesures et des contraintes liberticides extrêmes. D’expérience historique, un état d’exception est compatible avec la reproduction de rapports d’exploitation et avec la poursuite de la production de profit avec une forte intervention de l’Etat. Ce n’est pas un hasard si l’un des grands théoriciens de l’état d’exception », Carl Schmitt, a été un brillant admirateur de l’ordre nazi, qui a fourni le cadre juridique d’une société moderne en Europe pendant une dizaine d’années au prix d’effroyables horreurs. Plus proche de nous, il est indiscutable que l’ordre totalitaire hérité du maoïsme a été en mesure d’engendrer un régime capable de bâtir une puissance capitaliste moderne, au sein de laquelle l’explosion des inégalités sociales et la montée des conflits et des antagonismes de classe, ont été, jusqu’à présent, surmontées par des mesures despotiques.

Autre chose est l’application de ce modèle aux sociétés du vieux capitalisme à dominante privée, où l’état de droit règle par la cogestion des « partenaires sociaux » l’ensemble des relations sociales. En principe tout au moins, tant il est vrai que la direction des affaires économiques et publiques se fait de façon plus en plus autoritaire dans les formes actuelles du capitalisme libéral. La tendance était déjà manifeste avant l’avènement de la pandémie et l’écroulement prévisible de l’économie. L’évolution du capitalisme, sa crise de rentabilité et le besoin de maximisation des profits avait progressivement réduit l’espace de négociation et de cogestion, fondement du consensus de la démocratie représentative et de ses organisations. La crise de la représentativité politique que nous vivons depuis des années en est la conséquence immédiate.

Cela étant dit, on peut se demander si la mise en œuvre de ces mesures liberticides est liée à un projet conscient des pouvoirs de construire de façon durable, et avec une acceptation tout aussi durable, un état d’exception permanent. Ou l’adoption de ces mesures est-elle la seule réponse dont dispose la classe politique pour affronter les conséquences sociales de la pandémie ?

Comme lors de toute crise, la classe dirigeante doit jongler entre l’idée de la défense de l’intérêt général, qui fonde son hégémonie idéologique, et sa subordination aux vrais donneurs d’ordres, la classe capitaliste. En toute circonstance trouble, le seul plan B disponible est celui d’un renforcement de l’autoritarisme, d’un recours renforcé à la peur comme mode de gouvernement.

Dans la période actuelle, la dimension des contraintes exigées par l’ampleur de la crise virale mondiale pose, à terme, le problème d’une paralysie du système productif lui-même. Pour le moment, le ralentissement de l’économie n’est qu’à ses débuts et la poursuite de la vie sociale prouve indiscutablement la richesse et la puissance des sociétés capitalistes modernes. Si les mesures d’arrêt se prolongeaient, on risquerait de voir l’ensemble de la machine économique s’effondrer. Néanmoins, le passage rapide, en peu de jours, d’un état de stagnation économique à une récession vertigineuse avec des millions de chômeurs est le signe de la fragilité de l’ensemble de l’édifice. Ce qui explique les réticences d’une partie de la classe dirigeante à adopter des mesures d’état d’urgence sanitaire.

Les discours anti-liberticides sont justifiés, ils nous mettent en garde contre la perte de droits déjà bien maigres. Néanmoins, et compte tenu des effets désastreux que ces mesures d’exception peuvent avoir sur le déséquilibre de « leur » économie, on peut considérer que les systèmes politiques les adoptent, non pas dans le but premier de dompter la majorité de la population, de soumettre les exploités à de nouvelles conditions d’exploitation mais, avant tout, parce qu’ils s’y voient forcés par les circonstances, par une situation qui leur échappe. Bien sûr, les classes dirigeantes savent faire bon usage des mesures de l’état d’urgence, elles en profitent pour accélérer le démantèlement des droits dits « fondamentaux », transformer l’état de droit. Toutefois, des faits montrent l’ambiguïté de la situation. Ces mêmes classes politiques — en Europe et même ailleurs dans des pays où l’équilibre social est fragile — se voient forcées de revenir sur des orientations et des décisions prises auparavant. On donnera pour exemple la suspension en France de la haïssable « réforme des retraites » et de la « réforme des droits des chômeurs », le timide projet de libération de certaines catégories de prisonniers, en France, aux Etats-Unis, au Maroc ou ailleurs. Ce serait surestimer leur fonction et même leur intelligence de classe que de considérer que les dirigeants dominent la situation et sont capables d’aller au-delà des mesures de sauvegarde des lois du profit. Ce sont ces lois qui commandent leur initiative politique. Dans le cas présent de la crise sanitaire, le besoin de confinement des populations semble être la seule façon de tenter d’éviter une situation de désastre social et économique. On confine la population non pour affermir la domination sociale mais comme seul moyen de soulager un service de santé publique en lambeaux, conséquence de choix d’austérité. En voulant montrer qu’il maîtrise la situation, le système politique cherche à cacher ses responsabilités dans le désastre sanitaire. Il cherche à nier sa faillite du point de vue de la défense du fameux « intérêt général ». Avec un effet pervers à la clef : le blocage progressif de l’économie dû à ces mesures affaiblit à son tour la gouvernance.

Rien ne dit que la sortie du « confinement » puisse se faire sous la forme d’un retour harmonieux vers une reproduction du passé. Tel est, sans doute, le projet des seigneurs du profit et de leurs serviteurs politiques. Ceux-ci risquent de se trouver à la sortie de l’état d’urgence plus affaiblis qu’ils ne l’étaient avant le début de la crise. Et avec une autre urgence, celle d’une crise sociale étendue. La crise du capitalisme sera le deuxième épisode de la crise virale. C’est pourquoi, dès maintenant, la classe politique cherche à préparer la sortie comme un long processus permettant d’intégrer les mesures d’urgence dans un état de droit de plus en plus d’exception.

La crise de la représentation, déjà ancrée dans une société riche et violemment inégalitaire, ne sera que plus affirmée par les effets dévastateurs de la crise économique. Après le temps suspendu du confinement, les forces du capitalisme tenteront d’imposer un retour au mode de production du passé, aux lois du profit comme seule alternative. Mais, nous ne sommes pas au XIVe siècle de la peste noire et, en France tout au moins, on peut espérer que la révolte et la résistance accumulées au cours des dernières années pourront se nourrir des nouvelles solidarités qui se sont tissées pendant le confinement. Le collectif, seule source de création libératrice, devra reprendre toute sa place, s’étendre.

Du vécu de ces mois étranges, il ressort déjà un élément porteur d’espoir : l’expérience des soignants. Travaillant dans des conditions extrêmement difficiles et avec des moyens restreints par le choix politique de ceux- là mêmes qui désormais se présentent comme des sauveurs, les collectivités de soignants ont réussi à prendre en charge la survie de la société. Au-delà des hiérarchies et des bureaucraties, elles ont fait preuve d’organisation, d’improvisation, d’innovation et d’invention. Si l’horreur ne s’est pas davantage étendue, c’est à elles que nous le devons. Cette entraide de collectivités de travail a sans doute puisé son énergie dans une expérience de plusieurs années de lutte contre l’austérité et le manque, contre la destruction de leurs conditions de travail, contre l’attaque prédateur du capitalisme privé. Face à l’injustice de la mort, soudés par les valeurs de l’entraide, les soignants se sont ainsi réappropriés leur tâche, reprenant momentanément aux gestionnaires financiers le contrôle de leur activité. De par leur fonction, ces travailleurs sont conscients de leur utilité sociale pour la survie de la collectivité, conscience qui renforce leur engagement mais aussi leur force de contestation. Comme on l’avait déjà vu lors d’autres catastrophes, c’est ce sursaut qui peut constituer la charpente d’un projet d’avenir différent.

Nous vivons la peste, mais ce temps suspendu peut aussi être celui où nous cultivons et accumulons les colères. L’opportunité de leur affirmation viendra avec la vie, après le temps des charognards.

En attendant, et pour dompter peurs et angoisses, on peut prendre plaisir à lire ces quelques lignes d’un cher ami de Karl Marx, Heinrich Heine, écrites pendant des années de plomb, entre la révolution de 1848 et la Commune : « Ici règne actuellement le grand calme. Une paix de lassitude, de somnolence et de bâillements d’ennui. Tout est silencieux comme dans une nuit d’hiver enveloppée de neige. Rien qu’un petit bruit mystérieux et monotone, comme des gouttes qui tombent. Ce sont les rentes des capitaux, tombant sans cesse, goutte à goutte, dans les coffres-forts des capitalistes, et les faisant presque déborder ; on entend distinctement la crue continuelle des richesses des riches. De temps en temps, il se mêle à ce sourd clapotement quelque sanglot poussé à voix basse, le sanglot de l’indigence. Parfois aussi résonne un léger cliquetis, comme d’un couteau que l’on aiguise. [2]

[2] Heinrich Heine, Lutèce, Lettres sur la vie politique,…

»

Quelque chose du même ordre nous saisit aujourd’hui, le silence n’est pas toujours le calme, c’est aussi le temps où l’on aiguise les armes des comptes à régler.

C R

8 avril 2020

[1] Antonio Costa, premier ministre, déclaration à la télévision privée SIC, 20 mars 2020.

[2] Heinrich Heine, Lutèce, Lettres sur la vie politique, artistique et sociale de France (1855), précédé d’une présentation de Patricia Baudouin, La Fabrique, 2008.

A lire ici : https://lundi.am/La-Peste-et-la-Colere

Lettre de contestation amende confinement

Depuis le 17 mars 2020 la France est en situation de confinement.

De ce fait l’état d’urgence sanitaire est un régime d’exception mettant en place des mesures liberticides consistant à restreindre nos déplacements individuels afin de lutter contre l’épidémie du COVID-19.

Certes, pour pallier les carences de l’État, il nous faut minimiser nos déplacements et respecter les mesures de sécurité pour limiter une propagation trop rapide du virus et l’engorgement des hôpitaux.

Cependant depuis le début du confinement, ce sont plus de 6 millions de contrôles et plus de 359.000 procès verbaux qui ont été dénombrés et nous relayons de plus en plus de témoignages qui relatent des incohérences, des violences, beaucoup de zèle de la part des forces de l’ordre concernant ces verbalisations sur les réseaux sociaux.

* Prendre un pv parce qu’on ne marche pas en direction du supermarché,
* parce qu’on a pas pris d’attestation
* pour aller aux poubelles,
* parce qu’on n’a acheté qu’une seule baguette etc.

C’est pour cela que la defcol Garrigues Cévennes vous propose une lettre type de contestation face aux amendes forfaitaires pouvant être abusives infligées pour non-respect des mesures de confinement.

Attention, si vous entendez contester une amende, il ne faut surtout pas la régler ! Le paiement de l’amende vaut reconnaissance des faits.

⚠️⚠️⚠️
L’Etat distribue plus de contraventions que de masques ! Il fait plus de contrôles que de tests de dépistage ! Et nous devrions croire que c’est pour le bien commun!?

Ne nous laissons pas écraser par la surenchère sécuritaire et répressive qu’il tente de nous imposer! Contestons ces amendes abusives!

Lettre-type-Contestation-amende-contrôle-COVID19

Le contrôle judiciaire : une peine à peine déguisée !

Ou pourquoi nous voulons refuser le Contrôle Judiciaire ?

Face à la police, face à la justice, on lâche rien !

Depuis le début du mouvement GJ les contrôles judiciaires sont distribués à la pelle.

Que ce soit parce qu’on est convoqué pour un procès, parce qu’on a refusé la comparution immédiate et qu’on attend la date de report de notre procès ou parce qu’on est dans une instruction, ceux qui ne partent pas en détention provisoire ou n’ont pas eu droit au bracelet électronique ont la plupart du temps un contrôle judiciaire.

Souvent interprété comme une alternative à la détention, le contrôle judiciaire est en réalité une peine de plus déguisée.

Présentée comme une mesure afin d’éviter que la personne commette à nouveau l’infraction et/ou pour garantir sa présence à l’audience, celle-ci correspond bien à une peine infligée avant le jugement.

Car des obligations de pointer, des interdictions de se rendre en ville, en manifs ou de communiquer avec des tiers et autres inculpé-es, sont autant de contraintes qui nous condamnent avant notre procès.

Quid de la présomption d’innocence dans ce cas ?

Ce n’est pas parce qu’une instruction est en cours ou que nous sommes dans l’attente de notre procès que nous sommes coupables !

Alors NON le contrôle judiciaire n’est pas une faveur octroyée par le juge ou le procureur, au contraire ils s’en servent pour nous agiter le spectre carcéral : si vous ne le respectez pas vous irez en prison…

Bien que des taules mortifères soient en construction, les établissements pénitentiaires sont actuellement en surpopulation et l’état ne pourrait nous placer toutes et tous en détention ce pourquoi la justice préfère NOUS IMPOSER UN AUTO-CONTROLE PAR LE CONTROLE JUDICIAIRE !!!

Le Contrôle Judiciaire n’est donc PAS UNE FATALITE car il est possible d’éviter ces multiples peines et d’être ainsi considéré à juste titre comme innocent jusqu’au jugement !

Pour ce faire :

  • Nous disposons de 10 jours pour faire appel.
  • Nous pouvons demander la levée du CJ tous les jours (normalement à chaque changement de situation) mais rien ne limite le délais entre deux demandes !
  • Nous ne sommes pas obligé-es de passer par un avocat, il suffit d’envoyer une lettre au juge d’instruction ou au parquet avec accusé de réception.
  • Le juge ou le parquet a ensuite 5 jours pour répondre par ordonnance motivée.
  • « Faute par le juge d’instruction d’avoir statué dans ce délai, la personne peut saisir directement de sa demande la chambre d’accusation qui, sur les réquisitions écrites et motivées du procureur général, se prononce dans les vingt jours de sa saisine. A défaut, la mainlevée du contrôle judiciaire est acquise de plein droit, sauf si des vérifications concernant la demande de la personne ont été ordonnées. »

Nous conseillons donc de demander SYSTEMATIQUEMENT LA LEVEE TOTALE du contrôle judiciaire.

Et comme il faut y mettre quelques formules on vous propose un modèle :

La solidarité est notre arme !

Refus du contrôle judiciaire et que vive notre liberté!

Modèle (bientôt disponible en format téléchargeable…pour l’instant à vos copiez-collez dans LibreOffice Writer ou autre traitement de texte) :

Nom Prénom

Adresse (Une qui vous permette de recevoir l’accusé de réception…)

Affaire numéro (numéro de dossier de l’affaire)

Madame/Monsieur le juge (préciser d’instruction s’il y a instruction)

Service du greffe

Adresse de la juridiction

A (ville), le (date)

Objet : demande de main-levée / lettre recommandée avec accusé de réception

Madame/Monsieur le juge/le Président.

Je soussigné-e (NOM, Prénom), né-e le (date) à (lieu), domicilié-e (adresse) et agissant en qualité de (partie civile/personne mise en examen/inculpé-e) dans le dossier numéroté (numéro de l’affaire).

Par la présente lettre, je sollicite de votre haute autorité la main-levée de telle, telle et telle mesures (lister toutes les mesures du CJ) pour les raisons suivantes :

  • exemple : je ne peux pas pointer parce que j’ai une vie active, associative, familiale qui me demande beaucoup de temps et d’attention…qui me contraint à me déplacer souvent …

  • exemple : je suis obligé-e de me rendre à tel lieu parce que ma famille y réside et que j’assiste régulièrement un membre vieux, malade…

  • exemple : je suis dans l’obligation de me rendre à telle ville car c’est dans celle-ci que je m’approvisionne en matériel pour mon travail / c’est dans cette ville que je fais mes courses / que mes enfants ont des activités extra-scolaire…

En vous remerciant de l’attention que vous porterez à ma requête, je vous prie d’agréer Madame/Monsieur le juge/le président, mes sincères salutations.

Signature

Appel national 14/3 : quelques conseils

Le temps passe, mais la lutte ne cesse !

On est là et on sera encore là ce samedi à Paris.

Comme on entend chanter bien souvent en manif « Macron nous fait la guerre et sa police aussi », il vaut mieux partir avec quelques conseils en tête…

Voici quelques conseils de la défense collective Cévennes Garrigues avant et après manifestation.

AVANT DE PARTIR :

  •  Assurez vous d’avoir bien préparé vos garanties de représentations actualisées (contrat de
    travail, promesse d’embauche, attestation pôle emploi, domiciliation par facture de moins
    de trois mois ou attestation d’hébergement plus une facture de moins de trois mois au nom
    de celui qui vous héberge, justification de la situation familiale par le livret de famille, pacs,
    acte de mariage, etc…) dans un dossier que vous remettrez dans un lieu accessible à des
    proches prévenu-es qui le remettront à votre avocat-e en cas d’arrestation.
  •  Laissez un double de vos clefs, vos garanties de représentations, le numéro de la défense
    collective et les coordonnées de votre avocat-e à quelqu’un de confiance.
  • Vous pouvez également transmettre votre dossier de garanties par mail à defcolgj@riseup.net . Une copie numérisée est toujours une bonne chose !
  • Ne prenez pas votre téléphone habituel car celui-ci pourrait être utilisé contre vous lors d’une GAV
  • Prenez avec vous le nom de votre avocat en consultant la liste des avocat-es commis-es d’office et/ou participant au collectif anti-répression (bientôt une liste disponible !)

PENDANT LA MANIF :

  •  Si vous assistez à une arrestation, demandez le nom de l’interpellé-e et transmettez le au
    numéro de la défense collective 06 27 67 86 09 ou celui de la coordination anti-répression
    Paris au 07 52 95 71 71 11, et décrivez le contexte, précisez le lieu, l’heure, la violence de
    l’interpellation et si la personne semble blessé-e en prenant le soin de ne pas dire ce
    qu’aurait fait le/la camarade.
  •  N’oubliez pas d’utiliser le conditionnel ou le subjonctif afin de ne pas incriminer vos camarades lors de votre appel car celui-ci est peut être écouté !
  •  Pensez à prévenir vos camarades de ne plus communiquer avec lui/elle via les réseaux
    sociaux ou par tel car les flics pourraient utiliser vos propos à son encontre.
  •  Si vous êtes victime d’une arrestation essayez de prévenir vos proches et/ou en criant votre
    nom en demandant d’appeler les numéros ci-dessus.

EN GAV :

  • Utiliser la formulation « JE N’AI RIEN A DECLARER » permet de ne pas mentir et d’éviter
    de se « charger » en attendant de préparer sa défense. Le plus souvent les flics n’auront que ce que vous voudrez bien leur avouer, leur dossiers sont souvent très minces et les flics comptent essentiellement sur l’effet de la GAV en vous mettant la pression pour vous faire parler. C’est un droit aussi, du coup il faut pas avoir peur qu’on nous accuse d’avoir rien déclaré pendant un éventuel procès (alors que oui on peut être accusés d’avoir menti….).
  • Même si on vous présente « des preuves », TENEZ BON, continuer à dire « Je n’ai rien à déclarer » permet de voir si ces « preuves » seraient recevable dans un tribunal.
  • Même si c’est la grève, demandez à voir votre avocat-e ou l’avocat-e commis-e d’office et de consulter un médecin (ça les fait aussi chier et ça change de la cellule).

VOUS SORTEZ DE GAV :

Un petit schéma qui explique bien les différents cas de figure :

Sortie gav
Savoir à quoi s’attendre aide à attendre et tenir bon !!!

 

Si comparution immédiate :
– c’est possible de REFUSER LA COMPARUTION IMMEDIATE pour pouvoir préparer votre défense
collectivement et efficacement contre cette justice d’abatage (d’autant plus si grève des avocats !)
– Appelez les numéros ci dessus (celui de la défense collective ou coordination anti-répression) afin de pouvoir donner de vos nouvelles et prendre celles de nos camarades encore enfermé-es.
– Venez soutenir les camarades qui seront jugé-es en comparution immédiate le lundi, leur
montrer notre présence signifie que lorsqu’une personne est attaquée, c’est l’ensemble du
mouvement qui l’est.